L’isolation est un point essentiel dans une construction ou une rénovation. A l’heure où l’énergie devient de plus en plus chère et précieuse, il est plus qu’essentiel d’obtenir une bonne isolation d’un bâtiment. L’isolation se réfléchit aussi bien en hiver qu’en été car les canicules deviendront de plus en plus fréquentes. Dans l’idéal, il faut aujourd’hui viser le label maison passive.
Dans notre cas, il sera trop difficile d’obtenir une maison passive en partant d’une ferme et sans isolation extérieure. Pour autant, nous ferons au mieux pour consommer le moins possible de bois de chauffage et d’électricité.
Pour le bois de chauffage, nous serons autonome grâce aux forêts que nous possédons avec la ferme. Pour l’électricité, nous essayerons plus tard de travailler sur cet axe. A minima, nous serons connecté au réseau via une société fournissant de l’énergie verte comme Enercoop. Concernant les matériaux pour l’isolation, nous allons utiliser un maximum de matières bio-sourcées comme la laine de bois (40 cm prévu sur le toit). Nous avons aussi regardé Gramitherm qui utilise les fibres d’herbe ou encore le produit d’Emmaüs qui produit La Métisse à partir des vêtements recyclés.
Les murs en pierre
Dans le bâti ancien, il faut prendre en considération les murs anciens, parfois humides. L’humidité chez nous ne posait pas souci, si ce n’est dans l’ancienne étable et un drainage périphérique a permis de régler le problème. Ce type de bâtiment à besoin de respirer, on parle de perspirance dans le jargon technique.
Respiration du mur
L’idée est que les murs puissent respirer tout en rejetant l’excédant d’humidité vers l’extérieur. C’est ce qu’empêche notamment un enduit ciment qui, en rendant étanche le mur extérieur génère des désordres sur les murs tout en abimant les pierres tendres comme le calcaire. Ainsi, cette technique dite du chaux chanvre ou béton de chanvre est de plus en plus utilisée. Cette dernière consiste à effectuer une correction thermique en appliquant une couche de 5 cm environ ou à isoler avec une couche d’environ 15 cm d’épaisseur.
Le chaux chanvre à la rescousse
Deux techniques sont possibles pour isoler un mur avec du chaux chanvre. La première, manuelle, consiste à créer cette surépaisseur via un mécanisme de banche. Une planche est bloquée à la distance voulue et le chaux chanvre, aussi appelé béton de chanvre est disposé sans trop tasser derrière. En effet, l’idée est de stocker dans cet isolant un maximum d’air. L’autre technique consiste à utiliser une machine qui projette le mélange à même le mur.
Résistance thermique
La conductivité thermique de la chènevotte est annoncée à 0.05 W/m.K. Pour calculer le R (la résistance thermique), il faut diviser l’épaisseur par la conductivité. Ex : 0.15/0.05 soit R = 3. Ce R de 3 n’est pas formidable, on aurait tendance à vouloir mettre R = 5 mais les capacités hygrothermique du chaux chanvre permettent de palier cette faiblesse. Après, il faut savoir que la majorité de la chaleur se perd par le toit et cette isolation sera complétée par une isolation en sarking(isolation extérieur) du toit avec 40 cm d’isolant (R = 10) et le plancher aura quand à lui 200 mm d’un isolant biosource (R = 5).
Le magazine Maison écologique est une excellente lecture pour qui s’intéresse à l’éco-construction et à l’éco-rénovation des bâtiments. C’est dans ces lectures que nous avons découverts le chaux-chanvre et dans le cadre de la rénovation, nous étions allé nous former au musée des maisons comtoises à Nancray lors d’une journée dédiée au chaux-chanvre. Nous avions notamment fait du chaux chanvre banché et c’est ce que nous allons faire dans notre ferme sur certains murs.
Cette technique du chaux chanvre consiste donc à mélanger de la chaux hydraulique NHL 3.5 à de la chènevotte de chanvre. La chènevotte est le corps creux de la tige du chanvre. Le chanvre étant la cousine du cannabis récréatif mais sans la molécule psychotrope.
Le choix du couple chaux/chanvre
Le choix de la chaux et de la chènevotte n’est pas à faire n’importe comment. Il est possible de consulter le document pdf( ici )des couples chaux chanvre validés (qui sont compatibles). De notre côté, et après avoir travaillé avec la chaux NHL 3.5 Nathural blanche de Lafarge, nous sommes contents du produit et allons l’utiliser pour notre isolation. En outre, elle propose un tarif intéressant vu son conditionnement de 35 kg (environ 16-17 € chez les revendeurs de bricolage). Avec cette chaux hydraulique (qui sèche grâce à l’eau), nous avons le choix de deux fabricants de chènevotte. Si on se réfère au pdf dans la catégorie « mur », il est possible d’utiliser La Chanvrière , (marque kanabat) ou Biofibat. Notre fourniture proviendra du site Matériaux Naturels et s’orientera vers la marque Biofibat car nous n’avons pas trouvé en local et le gérant a été très compétitif dans sa proposition. La fiche technique de Biofibat est disponible ici
Le dosage et estimer le volume des matériaux
Pour le volume de chanvre à commander, nous nous sommes basés sur le calculateur du site suivant qui nous dit que pour la chènevotte Biofibat, il faut compter 150 litres par m² de mur sur une épaisseur de 15 cm.
Les sacs de chènevottes se vendent en 200 litres. Les sacs sont compactés. Pour un mètre carré, il faut 150 litres. Ceci nous permet d’obtenir facilement le volume à commander avec un produit en croix. La surface à isoler en chaux chanvre dans notre ferme est estimé par nos architectes à 184m². 64 m² dans le gîte et 120 m² au R+1 et R+2.
Cela nécessite donc un nombre de sacs de chènevotte à commander de 184*150/(200) soit 138 sacs et donc 2.7t de chanvre. Coût du sac : environ 20 € soit environ 2800 € de produit hors livraison. Les sacs sont conditionnés par 40 sur palette. On se retrouverait donc avec presque 4 palettes. Le volume de chaux chanvre est d’environ 30 m3.
Il sera nécessaire de prendre un peu de marge car les murs sont parfois tordus et nécessiteront davantage que 15 cm d’épaisseur pour rendre l’ensemble droit en cohérent.
Pour le volume de chaux, Lafarge, propose sur son site un pdf donnant des informations et pour un mur, le dosage est le suivant pour la chaux Nathural 35. 1 sac de 20 kg de chènevotte pour 8 seaux de 10 litres de chaux. Le seau est selon nous un excellent outil pour doser de façon homogène les différentes bétonnières.
Et en chaux, combien de sacs pour quel budget ?
Les sacs de Nathural pèsent 35 kilos, attention au dos ! Un sac de chaux de 35 kg contient environ 30 litres de chaux. Si on regarde les préconisations de Lafarge, il faut donc 2 sacs + 3/4 d’un autre sac. Partons sur 3 sacs de 35 kg pour 20 kg de chènevotte pour être large.
Si nous avons besoin de 140 sacs de chènevottes, nous aurons donc besoin de 140*2.75 sacs de chaux de 35 kg soit 385 sacs soit 13.4 tonnes de chaux. Nous retiendrons donc un chiffre d’environ 390 sacs pour laisser un peu de marge.
Avec un sac à environ 15-16 €, le budget chaux hydraulique est d’environ 5850€
Le matériel
Le matériel est assez simple :
- Bétonnière (volumineuse de préférence), nous aurons une bétonnière thermique de 350 l, ce qui permet de malaxer un sac de chènevotte complet.
- Règles télescopiques de plaquiste.
- Ces règles permettront de bloquer de niveau entre le sol et le plafond les plaques contreplaqué filmé (spécialement fait pour décoffrer).
- Truelles, taloches pour les finitions
- Gants, lunettes, très important car la chaux, très basique brûle la peau et les yeux
- Niveau laser et niveau à bulles pour bien s’aligner
- Perceuse, vis inox
- Liteaux
La mise en pratique
Piquetage de l’enduit existant
Au préalable, il est nécessaire de piqueter les enduits existants, surtout si ceux-ci sont faits de ciment. Bon courage dans ce cas là ! Nous l’avons fait au burineur et tout s’est très bien passé car nous n’avions pas ou quasiment pas de ciment ! Dépoussiérer et humidifier avant de mettre le chaux chanvre.
Gobetis
Un gobetis peut être nécessaire pour favoriser l’accroche du chaux chanvre. Il s’agit d’un mélange assez liquide de chaux avec du sable 0/3 que l’on projette à la truelle pour faire une sorte de salissure de 3 à 5 mm. Au niveau du dosage, matériaux naturels conseille de mettre 25 kg de chaux NHL2 pour 70 litres de sable et suffisamment d’eau pour que l’application soit efficace.
Poser une ossature bois pour maintenir le chaux chanvre
Ensuite, il faut fixer des liteaux de 4cm de section. 3 à 4 horizontalement puis tous les 60 cm verticalement avec des vis inox.
Disposer le chaux chanvre dans la banche
A partir de là, il est possible de fixer les règles de plaquistes de niveau, plaquer le contreplaqué filmé et venir répartir le chaux chanvre sans trop tasser par couche successive de 60 cm. Il est possible de monter directement en hauteur en montant la plaque de contreplaqué en laissant 10 cm sur la passe précédente. Tout en haut, il faudra finir à la main et à la taloche.
Penser aux réseaux
Il faudra par contre prévoir les réseaux et notamment l’électricité avant de bancher le chaux chanvre. Pour les prises, il existe des matériels pour le banchages béton qui feront parfaitement l’affaire. Il faudra travailler en amont avec électricité, plombier…pour éviter de casser l’isolation !
Le séchage
Le séchage est long et il faut bien aérer au début, j’ai pu lire qu’il fallait compter une semaine par centimètre donc environ 3 mois pour 15 cm avec une chaux NHL. En cas d’utilisation de chaux aérienne, le séchage sera beaucoup plus long.
Finition
La finition n’est pas obligatoire mais si l’on cherche une finition plus claire ou différente, il est possible de poser un enduit chaux sable ou chaux chanvre.
Réussir son mélange chaux chanvre à la bétonnière
C’est à priori un art que de trouver la bonne recette pour éviter les boulettes de chaux. Lafarge indique la marche à suivre
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